………………Morceaux de textes choisis | ||
Travail | Symbole majeur du Grade de Compagnon et du Rite | |
Thème | l’Etoile flamboyante | |
Auteur | Elisabeth Mutel – Orient de Paris, 11 mai 2005……… |
A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers,
Depuis l’étoile polaire, qualifiée d’axe du monde, ou clarté qui illumine l’obscurité de la nuit, l’étoile demeure un talisman qui a traversé les siècles et les continents. Unique ou multipliée dite alors « constellation d’étoiles » et pour les Francs-Maçons ‘‘Voûte étoilée’’, elles sont présentes dans toutes les cultures. Guidée par un ange dans la cosmologie juive où elle est appelée ‘‘Etoile de David ’’, elle était destinée à protéger les juifs contre les persécutions. Identifiée à des phénomènes célestes dans l’iconographie des cultes les plus divers, on la retrouve dans le firmament qui décorait tombeaux et sanctuaires. La multitude d’étoiles devait tout autant remémorer la descendance du patriarche Abraham qui aperçut la lumière isolée de l’Etoile du soir dans la nuit et voulut l’adorer. Ô combien d’entre nous ne sollicitent-ils pas leur bonne étoile considérée comme leur ange gardien ? Le symbolisme de l’étoile, incarnée par la Lumière jaillissant des ténèbres, est si universel qu’il est difficile de trouver son origine dans les manuscrits les plus anciens. Dans l’antiquité égyptienne, l’étoile évoquait le fils d’Isis et du Soleil, source intarissable de vie, étincelle du feu sacré, semence universelle créatrice des saisons.
Depuis l’Etoile de Bethléem, telle un guide des mages d’Orient vers la crèche. Filante et présente chaque année sur l’arbre de Noël, l’étoile a résisté au temps et n’a pas de frontière. Sans être particulièrement investie d’un caractère divin, elle a servi les dieux de l’Olympe par sa représentation dans leur odyssée spirituelle. De la civilisation chinoise à celle des Celtes jusqu’aux Incas, de Paris avec sa place de l’Etoile, à New York avec la couronne étoilée (à sept pointes) de la Statue de la Liberté –destinée à éclairer le monde– sculptée par le célèbre Franc-Maçon le Frère Frédéric Auguste Bartholdi, elle apparait comme un symbole planétaire utilisé dans les armoiries de nombreuses nations d’où l’appellation « bannière étoilée », sans oublier le billet vert avec sa nuée d’étoiles qui surmontent l’aigle, entouré du rameau d’olivier et d’une branche d’acacia. Ainsi, l’Etoile a toujours inspiré les hommes à des fins religieuses, y compris sociales jusqu’à devenir un signe de ralliement d’un peuple uni et devenir un emblème des valeurs civiques ou patriotiques. De nos jours, nous retrouvons encore le nombre d’Etoiles, classées de une à cinq, dans la qualification des chaines hôtelières et de restauration. Dans le monde du spectacle, nous assistons à la qualification d’étoiles montantes désignées sous l’appellation de »star » signifiant étoile en langue anglaise.
Depuis les temps les plus reculés, majestueuse et intemporelle, l’étoile a été interprétée dans toutes les expressions artistiques : ornementation architecturale, littérature, peinture, musique. Ainsi, elle est louée, voire sculptée sur des vestiges sacrés. Elle est reprise par des auteurs écrivains, poètes,… notamment par le Franc-Maçon Goethe qui l’adopta pour son blason, Victor Hugo (Les Châtiments, 1853, « Stella »), Albrecht Dürer (Madone avec couronne d’étoiles, sphère céleste, et 14 xylographies de l’Apocalypse 1498 et 1515), Mozart (Franc-Maçon à la SOT) et le ruissellement de la lumière dans l’opéra de la ‘‘Flûte Enchantée’’. Tout autant contemporaine, Antoine de Saint-Exupéry associe l’étoile dans le désert à l’amour, à la fraternité et à la beauté au travers de la merveilleuse histoire du « Petit Prince » ; Ermanno Olmi (réalisateur de films) l’appelle à l’écran en 1983 dans une œuvre imprégnée de spiritualité « En suivant l’étoile », ou encore chantée par Jacques Brel qui implore ‘‘l’inaccessible Etoile’’, et par le chœur des Padrés, aumôniers du Prytanée national militaire des forces armées françaises, sous le titre ‘‘Regarde l’Etoile’’.
Si le toit du monde a son joyau étoilé ; si l’ésotérisme occidental est pourvu dans le tarot d’une lame à l’icône magique dite majeure ; si la chrétienté l’a reprise sous le nom de ‘‘l’Etoile du berger’’, l’Etoile culmine dans le temple à l’Orient au-dessus du Trône du Vénérable. Dans nos Rituels, il y a lieu de ne pas associer l’Etoile flamboyante aux Lumières d’Ordre, ou Flambeaux des trois Piliers, également appelées ‘‘Etoiles’’. Ainsi, parmi les trois ornements de la Loge disposés dans le Temple, avec le Carré long et la Houppe dentelée, l’Etoile flamboyante à six pointes revêt une importance capitale avec la Lettre G en son centre. Aussi, en Franc-Maçonnerie, l’Etoile flamboyante et la Lettre G sont totalement indissociables. Cette Etoile accompagne le Compagnon durant son parcours initiatique. Nous observons cependant que si en certains Rites, l’Etoile n’est pas toujours présente dans le Temple au Grade d’Apprenti, au REP elle est permanente aux trois premiers Grades de saint Jean.
Depuis des générations, dans une certaine concordance des temps très simplifiée, l’ascension de l’étoile sur terre et dans les cieux est reconnue par tous, acteur et promoteur, elle guide et éclaire, identifie et personnifie, embellit et décore. Source de beauté, d’inspiration mystique et spirituelle, elle fait son entrée au XVIIIe siècle au sein de l’Institution maçonnique, qui lui octroie l’honorifique charge de « gardien » (que l’on peut traduire par éclaireur ou voyant lumineux) du Temple, dans lequel son rayonnement prend toute son ampleur avec ses six pointes ou direction de recherche. Néanmoins, pour la Maçonnerie écossaise, l’Hexagramme (brodé de couleur or sur le Sautoir du Maître de Loge et repris sur le Bijou du Maître Parfait Ecossais Chevalier de Saint André) est le symbole majeur du Rite Ecossais Primitif et de l’Ordre de Saint André du Chardon qui le coiffe On pourrait penser que l’Etoile devient le témoin silencieux, mais brillant et scintillant, de l’esprit des Frères et Sœurs réunis, sous les feux de son flamboiement, au travers de l’effet bénéfique de ses rayons illuminant les Travaux.
……..Placé à l’entraxe de l’univers (ou macrocosme) et de l’homme (ou microcosme), outre les trois Fenêtres, le Temple est éclairé par le Soleil, la Lune et « la Voûte étoilée ou dais d’Etoiles », soit de trois sources par analogie à la Lumière évoquée dans les textes bibliques, notamment le prologue de l’Evangile de Jean. Associées à la Trinité au travers des trois Grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie (la Bible, l’Equerre et le Compas), les Lumières de l’Ordre maçonnique sont accompagnées de l’Etoile flamboyante. Elle est le fil conducteur vers Dieu, et sur laquelle les valeurs d’une Maçonnerie chrétienne ont mis leur emprunte avec la lettre G, prise en tant qu’initiale du GADLU, identifié au Très Saint et Très Glorieux Seigneur Dieu, Grand Architecte du Ciel et de la Terre. Quant à la Lettre G, elle fait l’objet d’un Travail complémentaire. Parallèlement, nous relevons une observation d’Oswald Wirth, selon laquelle ‘’il n’aurait été question de l’Etoile flamboyante et de la lettre G dans aucun rituel antérieur à 1737, époque vers laquelle cet emblème fut adopté par les Loges françaises, fort éprises de philosophie hermétique’’.
Au REP, l’Etoile à six pointes résulte de l’entrelacement par leur base de deux triangles équilatéraux opposés. Egalement appelée ‘‘Sceau de Salomon’’ et ‘‘Hexalpha’’ (autre appellation de l’hexagramme salomonien) et du Pentalpha, l’un et l’autre kabbalistiques. Ceux-là font l’objet d’interprétations magiques mais aussi chrétiennes, au sujet desquelles Alec Mellor précise que par une pure coïncidence lourde de conséquence, cette figure symbolique renvoyait au ‘‘bouclier de David’’ ou ‘‘Sceau de Salomon,’’ d’où son adoption par la Franc-Maçonnerie. Parmi les symboles initiatiques, l’Hexagramme est sans conteste l’une des représentations et l’un des emblèmes les plus chargés de sens. Plus généralement, l’Hexagramme rejoint la réunion de deux principes complémentaires, à l’exemple du masculin et du féminin, du feu et de l’eau, de la matière et de l’esprit, du monde profane et de l’espace sacré. Au Rite Ecossais Primitif, le Sceau de Salomon s’inscrit dans la géométrie sous le nom d’Hexagramme, dont il est l’expression graphique des Plateaux qu’occupent les Officiers dans le Temple. Ainsi, les trois Maillets, dont les deux Surveillants sont placés aux deux angles de la base du Triangle ascendant (soit vers l’Occident), pendant que le Vénérable siège à l’angle opposé, soit à l’Orient pour diriger la Loge. Tandis que l’Orateur et le Secrétaire prennent place aux deux angles du Triangle descendant (soit vers l’Orient) et à l’angle opposé, est présent le Frère Terrible (soit à l’Occident) pour organiser les Travaux, si bien que le Vénérable et le Frère Terrible se font face.
…….Le Rituel au Grade de Compagnon nous précise que dans le monde profane, l’Etoile à six pointes renvoie à l’iconographie du Seau de Salomon, et selon la légende, elle est liée au souvenir de ce roi investi du pouvoir conféré par Dieu à Salomon sur le monde invisible. Ainsi, Robert Ambelain rappelle que « l’Etoile primitive est à six pointes et non à cinq branches. C’est aussi l’image d’une cristallisation minérale et, lorsque le Sceau de Salomon est couronné, il est en de nombreux manuscrits alchimiques l’expression du Grand Œuvre réalisé. Son flamboiement traduit l’éclatement d’une force continue, une puissance à la fois destructrice et créatrice. Les univers succèdent aux univers et la Création divine est éternelle, comme son Auteur. Car l’anneau mystérieux, qui conférait au roi Salomon, puissance sur un monde invisible, collabore à la construction du Temple de Jérusalem, cet anneau portant sur sa table une Etoile à six pointes, avec aux angles les quatre lettres du nom ineffable (celles du nom de Dieu en hébreu), que la Franc-Maçonnerie perpétue et honore sur le Sautoir du Maître de Loge. Ces quatre lettres étaient elles-mêmes serties de quatre pierres précieuses : le saphir qui donne la puissance, l’émeraude qui apporte l’intuition, le rubis qui procure la mémoire et l’escarboucle (rouge foncé) qui fortifie le cœur » Il est à observer que l’Etoile à six pointes n’est pas exclusive à la culture chrétienne dès lors qu’elle est le symbole de la Sagesse et de la vie pour rappeler le règne de Dieu sur l’Univers dans les six directions : outre le ciel et la Terre soit Nord, Sud, Est, Ouest pour constituer une harmonie d’équilibre représentant l’union entre le fini et l’infini, entre le monde visible et invisible. L’instruction dialoguée de ce deuxième Grade rajoute que l’Etoile flamboyante est placée à l’Orient du Temple, d’où part la vraie Lumière qui éclaire les quatre orientations du monde, de l’Orient à l’Occident.
……..Dans le Petit Mémento Maçonnique de 1921, rédigé sous la forme d’un dictionnaire, à l’usage des Loges du Grand Orient, il est dit que ‘’l’Etoile flamboyante est l’emblème de la pensée libre du feu sacré du génie, qui élève l’homme aux grandes choses’’. Dans le même esprit, selon le rituel du Grade de Compagnon, Jean-Marie Ragon confirme ce qui précède comme suit : « Elle est, pour les Maçons, l’emblème du Génie, qui élève l’âme à de grandes choses ; elle est éclairée parce qu’un illustre Initié (Pythagore) a recommandé de ne pas parler des choses divines sans flambeau ».
………Pour finir, je rajouterai que l’Etoile flamboyante, étoile de l’homme accompli, laisse rejaillir son feu intérieur à l’image du Sceau de Salomon et à l’unisson du Triangle pointé vers le haut du Tablier d’Apprenti, symbolisant le Feu, avec le Triangle pointé vers le bas du Tablier de Compagnon, symbolisant l’Eau.
(Travail déposé sur le site en juin 2006)