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Le Nombre trois de l’Apprenti

        Morceaux de textes choisis        

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Travail

… .Symbolisme des Nombres 

Thème

      le Nombre trois

Auteur ….. Elisabeth Mutel, Robert Ambelain n°14, Orient de Paris          

 

A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers

         Abondants sont les chiffres et les nombres qui ont leur histoire et bien des antécédents pris au sens d’ancienneté. Aussi le Nombre trois n’échappe pas à cette antériorité commune à l’histoire des civilisations, dont celles des trois religions monothéistes (chrétien, judaïque, mahométan). Pour les chrétiens, il correspond aux trois ministères ordonnés de l’Eglise : diacre, prêtre et évêque, aux trois Mystères de l’Eglise (Trinité, Incarnation et Rédemption), ainsi qu’aux trois vertus théologales (Foi, Espérance, Charité). Ce Nombre est repris pour rappeler les trois Rois Mages qui apportèrent chacun un présent – l’Or, la Myrrhe et l’Encens que les Francs-Maçons retrouvent en maintes cérémonies du Rite Ecossais Primitif –, soit trois offrandes à un enfant qui venait de naître. Plus tard, celui-ci fut crucifié avec trois clous en compagnie de deux victimes ; les trois hommes devant mourir sur la croix, le 3 avril 33 à 3 heures selon le calendrier julien, et pour le Christ à 33 ans et ressuscita le troisième jour.

         L’étymologie du Nombre trois renvoie au mot ‘’trèfle’’, qui à quatre feuilles est un présage de bonheur ou de malheur, et à triumvirat (du latin triumvir, tri signifiant ‘’trois’’ et vir ‘’homme’’) dont l’association de trois Consuls ou généraux de César et de Napoléon ne fut cependant pas une réussite.  Faisant référence à Christophe Colomb, le Génois parti à la découverte de nouveaux mondes avec trois caravelles, nous pouvons considérer qu’il avait entrepris un voyage initiatique ordonné par le royaume d’Espagne.  Brièvement l’histoire des nombres de 0 à 9, apparue en Inde en l’an 595, a sillonné d’Est en Ouest les routes mercantiles du Moyen-âge, pour détrôner au IVe siècle les chiffres romains trop fastidieux au profit du système indien, communément appelé ‘’chiffres arabes’’ parce qu’importés en Occident par eux. Toutefois, nous retrouvons dans les chiffres romains la prépondérance de l’unité et du trois.  Non seulement l’unité constante, le 1 (I), doublée – II –  donne le 2, et triplée – III – donne le 3. Mais cette unité, quand elle précède un Nombre, tel le 5 (V), lui soustrait un point pour le convertir en 4 (IV), et quand ce Nombre est suivi d’une unité, celle-ci est additive et donne le 6 (VI), et ainsi de suite pour le 7 et le 8 (VII et le VIII) ; sachant que l’unité est toujours seule avant ou après tous les Nombres de 0 à 9. Placée après le chiffre, elle n’est pas employée plus de trois fois, sauf quelques exceptions.  L’écriture des chiffres romains est néanmoins restée en un usage limité à la numérotation des heures des vieux cadrans des horloges, dans l’énumération des siècles, de certaines inventions ou produits de fabrication, et accompagne les prénoms des Souverains pontifes et des têtes couronnées.

         Le Trois a une longue carrière depuis l’antiquité et dans de nombreuses civilisations. En Chine, il est employé par Lao Tseu, fondateur du taoïsme Ve siècle av. J.-C., dans la corrélation parfaite entre le ciel, l’homme et la terre. Ainsi à partir d’un seul mot, ce Sage pose trois concordances qui s’ordonnent et se conjuguent entre le premier et les deux morceaux de phrases suivantes, telles que les trois exemples ci-après :

  •  » La bonté en parole amène la confiance ; la bonté en pensée amène la profondeur ; la bonté en donnant amène l’amour’’
  •  » Le trois engendre toutes choses. De toutes choses, l’envers est obscur. Et le flux de forces leur donne l’harmonie’’
  •  » Les vraies paroles ne séduisent jamais. Les belles paroles ne sont pas vérité. Les bonnes paroles n’argumentent pas »

La mythologie grecque nous apporte sa moisson de références ternaires, tel Aristote (disciple de Platon, 384 av. J.-C.) dans son traité du ciel : ‘’Il n’y a pas de grandeurs autres que celle-là, parce que trois renferment toutes les dimensions possibles. En effet ainsi que le disent les pythagoriciens, l’univers entier et toutes les choses dont il est composé sont déterminées par ce nombre trois. A les entendre, la fin, le milieu et le commencement forment le nombre de l’univers et ces trois termes représentent le terme de la triade.’’  Rappelons pour mémoire que la triade (groupe de trois personnes, de trois couplets, trois divinités, etc.), est reprise depuis les temps les plus reculés par plusieurs cultes, en Inde (Brahma, Vischnou, Civa), en Egypte (Osiris, Isis, Horus), au Tibet (Aon, Mout, Khonsou), en Egypte (Osiris, Isis, Horus), toujours en Egypte les trois frères Zeus (Dieu du ciel), Poséidon (Dieu de la mer et des eaux) et Hadès (Dieu des enfers).  Pour les Egyptiens, les trois éléments Akh, Ba, Kha, entrent dans la composition de l’être humain et dépassent la dualité entre le corps et l’âme. Comme évoquée, la triade se retrouve aujourd’hui dans les trois pôles qui dominent l’économie mondiale, la Chine, la CEE et les USA. Nous ne pouvons manquer de rappeler un aspect trinitaire occulté par une énergie divine préservée des Dieux et révélé par les Grecs sous les traits d’un personnage mythique, Hermès Trismégiste dit le Trois fois grand, prince de l’hermétisme, Maître dans les trois dimensions des états solides, liquides et gazeux.

Les références au Nombre trois sont présentes dans de nombreuses religions, telles que révélées dans les Ecritures sacrées de la Bible et du Talmud :

  • Les trois fils d’Adam (Caïn, Abel et Seth), les trois fils de Noé (Sem, Cham, Japhet) ; les trois anges qui visitent Abraham ; les trois rois mages ci-avant cités : Melchior (roi des Perses), Balthazar (roi des Arabes), Gaspard (roi en Inde) ; les trois jours passés par Jonas dans la baleine pour calmer la tempête ; les trois compagnons du prophète Daniel. La parole du Christ à Pierre ‘’Avant que le coq chante, tu me renieras trois fois’’ ;
  • Les trois archanges : Gabriel, Michel, Raphaël ;
  • Dans le Talmud, il est dit : ‘’le monde se maintient par trois choses, par la vérité, par la justice et par la concorde… Toutes les trois ne sont qu’une seule et même chose’’.

         Dans l’art, dont celui de la musique, qui tire sa révérence au trois parfaitement orchestré à l’exemple de Wagner dans sa Trilogie qui repose en fait sur un cycle de quatre opéras, pendant que la littérature et les compositions théâtrales reprennent ce mot pour désigner trois tragédies ; également dans les œuvres maçonniques de Mozart (dont celle de la célèbre Flûte enchantée). Celui-ci très ouvert aux idées humanistes du Siècle des Lumières, par son appartenance au sein de l’Ordre Illustre de Stricte Observance, fait appel aux rythmes pointés, tierces, trois bémols. Les anapestes (pied de vers composé de trois syllabes, deux brèves suivies d’une longue) utilisés dans les Marches guerrières ou funèbre de la comédie antique. Dans l’art de la peinture, les trois couleurs primaires entrent dans la création d’autres couleurs, ajustées avec le blanc (sans coloration particulière mais neutre), qui tient une place analogue à celle du zéro, nulle ou négative dans l’énumération des nombres.

         Pour le néophyte en recherche, une parenthèse est à ouvrir dans la faculté que lui offre la voie initiatique, celle de voir dans le trois un symbole de réflexion et de quête de l’absolu. Si l’on part du concept de la Trinité chrétienne (Père, Fils et Saint-Esprit), d’où nait la création (ou unité), toutes choses prises séparément ne peuvent être parfaites puisque la perfection est unité. Intervient alors le deux conçu comme un antagonisme ou une imperfection, qu’il convient d’associer à un autre symbole complémentaire aux fins de nous conduire vers le chemin de la perfection ; ce symbole additif concède une place au trois, parce que les trois signes réunis confèrent à la Trinité la perfection.  Quant à la Trinité divine du catholicisme, elle est symboliquement représentée par les trois côtés et les trois angles égaux du triangle équilatéral. Ainsi la combinaison de l’unité (le I) par le cumul d’une deuxième unité puis d’une troisième, donne le trois (III) pour parvenir à l’équilibre et à la stabilité, que nous retrouvons dans le Triangle dit parfait au REP.

            Mais revenons au trois par une observation qui s’impose dans la nuance entre chiffres et nombres, parce que tous les nombres (du latin numerus) sont écrits à partir des chiffres 0 à 9, tout comme les numéros constitués de chiffres et parfois de lettres ajoutées, relèvent d’une inscription dans une série (qui donne le premier, deuxième, troisième,…. jusqu’au dernier) ou une classification ayant pour objet une identification, un rang dans l’ordre d’une série permettant de dresser des statistiques ou une liste d’énumération par catégorie, ou encore pour fournir un code d’accès. Quant aux nombres, qu’ils soient pairs ou impairs, ils relèvent d’un résultat, d’un comptage ou d’une évaluation selon les règles de calcul (addition, division, multiplication, etc.).  Hormis le préfixe, le mot tri vient de la racine du latin et du grec ‘’tri’’ signifiant trois ou triple, mais il évoque d’autres définitions, celles de séparer, répartir, classer, ranger et ordonner ou sélectionner.  Or certains chiffres et nombres ont valeur de symbole, dont le 1 qui est l’unité marque l’opposition entre le singulier et le pluriel jusqu’à la dualité, laquelle n’existe que par la perception de l’unité et de l’unique. Ainsi, les nombres conduisent à la numérologie à l’exemple du nombre 3, cumul du 1 et du 2, à associer à la création, la transmission, la communication.

Par ailleurs le 3, objet du présent Travail, fait partie des dix signes de 0 à 9, il est donc indéniablement un nombre composé de trois unités, pendant que la qualité octroyée au zéro est plus complexe et abstraite, puisque ce chiffre pris seul représente l’absence de quantité dite nulle ou le néant, pour prendre une tout autre dimension dans les calculs dans lesquels il est intégré de fait.  Ainsi, nous parlons bien du nombre 3 qui fait référence à une valeur quantitative, tels trois objets ou trois personnes et qui relèvent d’une référence ternaire (du latin ternarius), composition de trois éléments ou trois unités, à l’exemple du Ternaire cosmique (Ténèbres, Lumière, Temps au sens de durée). Nous trouvons un autre modèle avec ‘’thèse, antithèse et synthèse’’ et les trois règnes ‘’végétal, minéral, animal’’. Au plan spirituel, le modèle ternaire s’impose toujours par le Verbe, le Logos, le Principe créateur.

En philosophie et sciences occultes, nous trouvons encore et toujours le Ternaire :

  • Platon l’utilise dans ses écrits avec le principe – verbe – substance
  • Pour les mystiques, il se réfèrent à l’esprit – l’âme – le corps
  • En Alchimie, souffre – mercure – sel
  • En communication, introduction – développement – conclusion, etc…..

En d’autres occasions, nous côtoyons le ternaire dans l’usage des trois coups de marteau qui annoncent la levée du rideau sur la scène d’un théâtre afin de créer une certaine atmosphère, tout comme le marteau du juge d’instruction dans un tribunal.  La langue française dans sa richesse permet certaines finesses, quand nous disons être trois autour d’une table, comme celle d’affirmer que nous somme au nombre de trois et non au chiffre de trois personnes ou davantage, tandis qu’une autre subtilité veut que dans une entreprise commerciale nous appelons le chiffre d’affaires sans tenir compte qu’il s’agit d’un montant unique calculé dans le bilan.  Enfin, le Trois impair est aussi un nombre premier et entier qui n’admet que deux divisions par l’unité (le 1) et lui-même.  Les nombres offrent une autre propriété, celle d’être un outil de mesure de l’espace et du temps. Succinctement et sans aborder les sciences et les techniques du trait, l’unité n’est point dans l’espace ou sur une surface autre chose qu’un seul point qui, reproduit à l’infini sans interruption, fournit une ligne droite ou courbe, mais sans définir une figure géométrique maîtrisée. De même que deux points nettement séparés et reliés ne peuvent fournir qu’une ligne strictement droite. En revanche trois points non contigus reliés entre eux forment la base géométrique du triangle à trois côtés et à trois angles, du latin triangulus, dérivé de angulus (angle) et du préfixe tri (trois). En conséquence, le trois permet toute conception structurée.  A tel point, qu’aucune construction ne peut être envisagée sur un seul ou deux appuis, parce que l’équilibre ne sera trouvé qu’avec un troisième pilier, à l’image des les trois Piliers constituant un trépied qui fournit une stabilité minimale. Tel il en est ainsi pour l’édification du Temple qui s’appuie sur les trois Piliers ou Colonnettes disposées autour du Carré long, d’autant que les deux colonnes J et B, modèle binaire, étaient placées à la Porte d’Occident à l’extérieur du Temple du roi Salomon, puisqu’au nombre de deux, elles ne peuvent rien supporter. Certes, si le chiffre 2 est le nombre de la science, il renvoie parallèlement à un antagonisme qu’il convient de concilier, le 3 permettant de rapporter la dualité à l’unité. Le ternaire ‘’thèse antithèse synthèse’’, de ce qui apparaissait opposé ou en contradiction, constitue la représentation intelligible de l’unité ; ce que Khalil Gibran illustrait de manière à la fois pragmatique et poétique en écrivant ‘’Le premier baiser est l’union de deux fleurs parfumées afin que de leurs senteurs mêlées naisse une troisième âme’’.  Nous pouvons affirmer que le nombre trois est une valeur ajoutée qui favorise l’équilibre, l’harmonie et l’acquisition de la Connaissance impactée par les sens mis en éveil lors des cérémonies rituelles : la vue (dans une observation soutenue), l’ouïe (par l’écoute attentive des propos et des sons), le vocal (par l’expression orale maîtrisée), le manuel (par l’expression écrite qui traduit la compréhension), le pédestre (par la gestuelle rigoureuse dans les interventions et les déplacements qui accompagnent les actes rituels de l’Occident jusqu’à l’Orient), et accessoirement l’odorat (en certaines circonstances).

Ainsi la Franc-Maçonnerie a retenu le symbolisme des Nombres, et ce dès le Grade d’Apprenti avec les Trois Maillets (Vénérable, Premier Surveillant et Second Surveillant), parce que trois dirigent la Loge, comme nous disons que les Degrés ou Grades symboliques sont au nombre de trois (Apprenti, Compagnon, Maître).  Comme souligné dans l’énumération qui suit, nous verrons que ce nombre 3 est omniprésent dans les Rituels,

  • les trois Grades symboliques ou les trois Classes (Classe des Apprentis, Classe des Compagnons, Chambre de Milieu) constituent les trois étapes du cheminement initiatique, dont la Franc-Maçonnerie s’est inspirée des Guildes du Moyen-âge qui faisaient usage de niveaux de qualification ;
  • par les trois grands coups frappés à la porte du Temple, véritable sésame d’accès au Temple, réitérés de trois coups de Maillet qui marquent un ordre du commandement à l’Ouverture et à la fermeture des Travaux au Signe d’Apprenti ;
  • leur signification correspond aux trois Paroles des écritures sacrées (Matthieu 7, 7) ‘’… Car quiconque demande reçoit, celui qui cherche trouve, et l’on ouvre à celui qui frappe…’’ et selon notre Instruction dialoguée : ‘’Frappez et on vous ouvrira (les Portes du Temple), cherchez et vous trouverez (la Vérité), demandez et vous recevrez (la Lumière) ‘’ ;
  • trois nouveaux coups de Maillet sont donnés par le Vénérable avant d’accorder la Lumière au Récipiendaire, qui aura à accomplir son premier Travail d’Apprenti en appliquant trois coups de Marteau sur la Pierre brute  enfin avant d’être reçu Apprenti, trois autres coups de Maillet sont frappés par le Vénérable sur la tête du Compas qu’il tient de la main gauche, pointe posée sur son sein gauche ;
  • les trois questions d’Ordre auxquelles l’Apprenti devra se soumettre avant la cérémonie de son Initiation ;
  • la Batterie de trois coups au Grade d’Apprenti (à ne pas confondre avec la triple Batterie réservée à la Batterie d’Allégresse pour célébrer un heureux événement), dont les deux premiers coups rapprochés marquent plus particulièrement le zèle du Maçon, le troisième la persévérance dans le Bien ;
  • les trois outils de l’Apprenti : Marteau, Ciseau, Perpendiculaire ;
  • hormis la Chambre de réflexion qui nécessite une position statique et de transit au centre de la Terre, se succèdent des déplacements coordonnés en trois Voyages dans la pénombre et le silence, bien qu’interrompu de bruits plus ou moins intempestifs. Ces Voyages sont à rapprocher d’Epreuves symboliques par les trois éléments eau (source de vie et de régénérescence), air (purification et médiation entre eau et feu), feu (élément de fusion qui conduit au divin ou au sacré) dans un parcours, qui incarne la carrière pénible que l’Homme aura à affronter pour saisir les travaux immenses qu’il a à faire sur son esprit et son cœur, tout en ponctuant l’état de contraintes et de dangers qu’il devra affronter ;
  • les trois fenêtres grillagées représentées sur le Tapis du Grade, pour l’une d’elles au plus proche de l’Orient, les deux autres à l’Occident et au Midi, parce que le Soleil n’éclaire que faiblement cette partie du Temple, en correspondance avec les trois points de l’horizon, et permettre d’éclairer les Ouvriers durant le Travail et lorsqu’ils repartent. A grille fixe, elles sont citées au Livre des Rois et rattachées aux trois Portes du Temple du roi Salomon.
  • au nombre de trois, les marches au Grade d’Apprenti symbolisent pour la première, le plan physique ou matériel, la deuxième le plan astral, enfin le plan psychique ou mental, correspondant au ternaire propre à l’Homme  -corps, âme et esprit-. Elles illustrent respectivement les efforts que le nouvel Initié doit entreprendre pour se libérer de la matière, ensuite au plan astral anéantir émotions et sentiments envahissants, enfin dominer passions déréglées et préjugés, afin d’accéder au plan supérieur à celui suivant l’Initiation ;
  • les trois pas de l’Apprenti marquent successivement à chaque assemblage des pieds un angle droit, pour signifier que la droiture est nécessaire à celui qui veut parvenir à la science. Glissés au ras du sol de façon à ne pas s’écarter du chemin, les trois pas lui permettent d’avancer avec prudence dans une posture corporelle inspirée de rectitude et donc de droiture. C’est ainsi que dès l’Initiation intervient la discipline du corps en mouvement. Les trois pas de l’Apprenti annoncent ce qu’il doit à l’Auteur de toutes choses, à ses Frères et à lui-même ;
  • trois grenades disposées au sommet de chacune des deux colonnes J et B, premier symbole végétal apparent et conservé sur le Tapis au Grade d’Apprenti du REP, incarnent la charité et l’humilité (cf. saint Grégoire le Grand, docteur de l’Eglise et pape). Symbole sexuel et donc de fécondité, repris par les grands ésotéristes antiques de Babylone et de la Grèce, les graines des grenades sans nombre reflètent l’union des Maçons autour d’un idéal commun ;
  • l’âge de l’Apprenti est de trois ans, parce qu’il faut trois ans pour faire un bon Apprenti.

Le Rituel du premier Grade précisant que trois années sont nécessaires pour faire un bon Apprenti, nous pouvons donc prétendre que l’Apprenti a trois ans dès son Inititation aux Mystères des trois premiers Nombres, dont l’application reste en vigueur aux Grades symboliques de Compagnon et de Maître. Aussi nous trouvons :

  • les trois grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie, dont la première est la Bible pour régler la Foi, l’Equerre pour cerner les actions de la vie, le Compas pour rappeler les Devoirs envers le prochain et les Frères ;  à ne pas confondre avec les trois Grandes Lumières de la Loge : Soleil, Lune et Etoile flamboyante ;
  • les Bijoux portés par les Trois Maillets ci-avant cités, comme ceux des autres Officiers, dits Bijoux mobiles parce qu’ils sont destinés à passer d’un Officier à un autre à chaque modification du Collège d’Officiers, sont à rapprocher de la symbolique des trois Grandes Lumières dans le gouvernement de la Loge par l’Equerre (du Vénérable) qui confère le pouvoir et le commandement, le Niveau (premier Surveillant) qui symbolise l’égalité, la Perpendiculaire ou ligne d’à-plomb (second Surveillant) qui rappelle la rectitude de jugement ; le Compas n’étant pas uniquement un outil actif mais un attribut des trois Grades symboliques ; 
  • les trois Bijoux immobiles (Pierre brute, Pierre cubique à pointe, Planche à tracer) ;
  • le Chandelier à trois branches disposé sur l’Autel d’Orient est l’emblème de la triple puissance de Dieu Tout-puissant figuré par le Grand Architecte de l’Univers ;
  • les trois Flambeaux qui éclairent la Loge parce que le Soleil ne parcourt que trois points de l’horizon, sont dits Lumières d’Ordre (ou petites Lumières) placées au sommet des trois Piliers ou Colonnettes (Sagesse, Beauté, Force) ;
  • les trois ornements de la Loge (le Carré long, l’Etoile flamboyante et la Houppe dentelée) ;
  • le Baiser de Paix, dit fraternel, donné en trois fois : joue droite, joue gauche, front ;
  • l’Acclamation écossaise uniquement aux Grades d’Apprenti et de Compagnon prononcée à trois reprises avec Huzza, dès lors qu’il n’y a pas d’Acclamation au 3ème Grade, laquelle est contraire à la profonde tristesse ;
  • la bavette des Tabliers aux Grades de saint Jean de forme triangulaire, à savoir à trois côtés et trois angles ;
  • selon les anciens Usages, les plateaux des Officiers et les Piliers autour du Carré long, sont à trois côtés (le Rituel précise ‘’tables faites en équerre dans l’idéal’’, ou dans leur conception en une forme triangulaire). Il convient également de reprendre les Portes ci-avant citées, dont l’instruction du troisième Grade du REP rappelle les trois Portes (une à l’Orient, une au Midi et une autre à l’Occident). Toujours au Grade de Maître, sont connus trois mauvais Compagnons provenant desdites Portes, et les coups réitérés par chacun d’eux en trois fois, lors du récit rituellique de la mort de l’Architecte ;
  • les trois points présentés en triangle, pointe haute, utilisés dans les abréviations ;
  • enfin la devise de l’Ordre du REP placée dans la lignée du ternaire ‘’Vie  Lumière  Amour’’.

Pour tenter d’être exhaustifs, précision est donnée que le Delta (dit lumineux en d’autres Rites) occupé en son centre de l’œil divin, est absent aux Grades symboliques du Rite Ecossais Primitif, soit au sein des Loges de saint Jean. En revanche, le Triangle parfait prend place en Loge de saint André intégrant en son centre le Tétragramme sacré formé des lettres Iod, Hé, Vau, Hé, nom divin dont la prononciation était réservée au grand-prêtre chez les Hébreux une seule fois par an.  Au REP, ce Triangle n’est pas isocèle, à la base plus longue que les deux côtés, étant plutôt en ce cas à l’image du fronton des Temples de l’Antiquité, mais bien un triangle équilatéral parce qu’il est parfait. Il est tel un bijou constitué d’un Triangle d’Or qui était porté sur le cœur. Ce Delta figure au sommet du Tableau du cinquième Grade sous forme d’un Triangle resplendissant comprenant l’inscription SHI’Sauve l’Humanité I(j)ésus’’.

Aux trois Grades symboliques du REP, culmine à l’Orient l’Etoile flamboyante à six pointes en ce Rite (et non à cinq branches) pour exprimer l’éclatement d’une force contenue, issue du tracé de la Loge pour marquer l’entrelacement de deux triangles équilatéraux opposés figurant le sceau de Salomon comme suit :  

  • l’un aux deux angles, formant la base d’un triangle équilatéral ascendant de l’Occident vers l’Orient, et le troisième isolé à son sommet, incarnent les trois Maillets qui dirigent la Loge. Ce triangle rappelle la puissance et l’autorité ;
  • l’autre, dont les deux angles de la base sont occupés par deux Officiers, chacun placés côté Lune (Secrétaire) et côté Soleil (Orateur), qui soutiennent la Loge. Ce second triangle équilatéral descendant de l’Orient jusqu’à la Porte d’Occident par son angle isolé accueille le Frère Terrible, en correspondance directe avec le Vénérable, dont le Trône est figuré par le sommet du triangle ascendant. Ce triangle incarne respectivement la mémoire et la communication (Secrétaire), la Loi et la Justice (Orateur), la connaissance et la protection (Frère Terrible ou Vénérable descendant de charge).
         La Franc-Maçonnerie n’évoque point le chiffre 3 et plus généralement tous les chiffres, mais seulement les nombres.  Que l’observance du Ternaire, si vanté depuis l’antiquité, dont la spécificité est maintenue aux Grades et Degrés du REP, nous apporte un enseignement sur les Mystères des Nombres, alors que le monde profane, toujours divisé, ne peut proposer semblable symbolique. Cette énumération démontre combien est significatif le Nombre trois en Franc-Maçonnerie, tout en mettant l’accent sur les aspects historiques et symboliques qui ont fortement marqué notre société à partir du modèle ternaire. La prise de conscience de cette prégnance par l’Initiation nous accorde une liberté d’expression dans la progression de notre cheminement.

Quant aux « mystères« , ce terme a fait son entrée dans la Tradition chrétienne des premiers siècles après J.-C. pour qualifier ce qui est à rapprocher des lois qui régissent toutes véritable Initiation. Ainsi, la mystagogie était la science de trois mystères, la religion, la magie et l’occultisme.

(Morceau d’Architecture déposé sur le site en août 2021)